POEMES SUR LE BESOIN D'ESPACE

 

 
90.   L'appel du large   (Charles Baudelaire)

 

Un matin nous partons, le cerveau plein de flamme,
Le coeur gros de rancune et de désirs amers,
Et nous allons, suivant le rythme de la lame,
Berçant notre infini sur le fini des mers.

 
Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent
Pour partir, coeurs légers, semblables aux ballons,
De leur fatalité jamais ils ne s'écartent,
Et sans savoir pourquoi, disent toujours : Allons !

 
Amer savoir, celui qu'on tire du voyage !
Le monde, monotone et petit, aujourd'hui,
Hier, demain, toujours, nous fait voir notre image :
Une oasis d'horreur dans un désert d'ennui !

(extraits du Voyage - Les Fleurs du Mal)

  

 91.  Ma vie de bohème  (Arthur Rimbaud 1854-1891)

 

Je m'en allais, les poings dans mes poches crevées,
Mon paletot aussi devenait idéal ;
J'allais sous le ciel, Muse ! et j'étais ton féal ;
Oh ! là, là !que d'amours splendides j'ai rêvées !

 
Mon unique culotte avait un large trou.
- Petit Poucet rêveur, j'égrenais dans ma course
Des rimes. Mon auberge était la Grand Ourse.
- Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou.

 
Et je les écoutais, assis au bord des routes,
Ces bons soirs de septembre où je sentais des gouttes
De rosée à mon front, comme un vin de vigueur ;

 
Où rimant au milieu des ombres fantastiques,
Comme des lyres, je tirais les élastiques
De mes souliers blessés, un pied près de mon coeur !

 

A la recherche de l'aventure...

 

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